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L'Invisible au Travail : Ces Emotions que l'On Cache derrière le Badge

  • 19 juin
  • 3 min de lecture

Chaque matin, on enfile son badge comme on attache une cape.


Pas une cape de héros, non. Plutôt un uniforme invisible. Un masque. Une armure parfois. C'est discret, presque banal. Ce petit bout de plastique autour du cou, ou glissé dans une poche, c'est la clé d'accès à l'entreprise, à son bureau, à sa fonction. Mais c'est aussi, souvent, le sas qui nous sépare de ce qu'on vit à l'intérieur.


Car derrière ce badge, il y a tout un monde.


Un monde de colères rentrées, de rires contenus, de larmes vite séchées dans les toilettes. Un monde de fiertés silencieuses, de combats invisibles, de tempêtes intérieures qu'on apprend à maquiller. Parce qu'au travail, il faut être "pro". Et être pro, dans la tête de beaucoup, c'est taire le personnel.


Mais qui a dit que l'on devait être amputé de ses émotions pour être compétent ?


L'art de faire "bonne figure"


Dès l'entrée, le décor est planté. Un "Bonjour, ça va ?" qui attend un "Oui et toi ?" en retour. Même si ça ne va pas. Surtout si ça ne va pas. Parce que dire l'inverse, c'est risquer de crisper, de surprendre, de ralentir.


Alors on sourit. On blague à la machine à café. On fait mine de tout gérer même si on a mal dormi, si on a peur de perdre ce boulot ou si on vient d'apprendre une mauvaise nouvelle. La performance prime. Et la vulnérabilité reste souvent dans le coffre à clé.

Mais ce badge ne sait rien de nos nuits blanches.


Le badge ne montre pas l'usure


Il y a cette fatigue qui ne dit pas son nom. Celle qui ne part pas avec un week-end. Celle qu'on accumule, au fil des mails, des réunions inutiles, des injonctions contradictoires. Celle de devoir être toujours disponible, toujours prêt, toujours positif.


Parfois, on s'épuise à essayer de rester à flot. On déploie une énergie folle à cacher qu'on est juste... humain. Avec ses limites, ses peurs, ses coups de mou. Et l'entreprise ne voit que ce qu'on produit. Rarement ce que cela nous coûte.


Les "invisibles" parmi les visibles


Dans chaque entreprise, il y a ceux qu'on voit peu. Ceux qui ne font pas de bruit. Qui arrivent à l'heure, font leur travail, et repartent. Ceux dont on oublie parfois le prénom, mais qui sont là, toujours. Derrier ce badge, il y a parfois une mère solo qui court après les horaires, un aidant familial qui fait des nuits blanches, un jeune qui doute, un cadre en dépression masquée.


Il y a ceux qui font semblant, tous les jours. Pas pour tromper, mais pour tenir.


Ce que l'on ne dit pas...


On ne dit pas toujours qu'on a peur.

Peur de l'échec, peur de ne pas être à la hauteur, peur d'être remplacé par plus jeune, plus rapide, plus malléable. On ne dit pas qu'on doute. De soi, des autres, du sens de tout cela. On ne dit pas qu'on est triste. Ou en colère. Parce qu'ça ne se fait pas. Parce que ce n'est pas "pro".


Alors on garde tout ça en dedans. Jusqu'à ce que ça craque. Ou pas. Mais à quel prix ?


Et si on changeait de posture ?

Et si être pro, c'était justement être capable d'être vrai ? D'oser dire : "Aujourd'hui, ça va moyen." De permettre aux autres de le dire aussi. D'accueillir un silence sans vouloir le combler. D'écouter sans solutionner. De voir la personne avant la fonction.

L'entreprise n'est pas un cabinet de psy, certes. Mais c'est un lieu de vie. Et dans "vie", il y a la fatigue, les émotions, les jours sans, les fragilités.


Si on faisait une place à cela, peut-être qu'on gagnerait en humanité... et en efficacité aussi.


Badge visible, humain invisible ?


Le badge montre qu'on appartient à une organisation. Mais il ne raconte pas notre histoire.

Il ne dit pas les efforts qu'on fait juste pour venir. Il ne dit pas la charge mentale. Il ne dit pas les soirs où l'on rentre vidé. Il ne dit pas le courage silencieux.

Alors, prenons soin de ceux qui nous entourent. Observons mieux. Développons l'art de demander : "Comment ça va ?"... et d'écouter vraiment la réponse.


Derrière chaque badge, il y a un monde. Il est temps de le regarder.

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Christophe PIEDNOIR

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Christophe PIEDNOIR

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