top of page
Rechercher

Aujourd'hui, C'est Lundi,


Je me réveille comme à mon habitude. Le réveil sonne, la lumière timide du matin se faufile dans la pièce. Les gestes sont mécaniques : ouvrir les yeux, tendre le bras, couper l’alarme, poser les pieds au sol. Mais ce matin, quelque chose bloque. Ce matin, je n’irai pas travailler. Pas aujourd’hui.



Jeudi dernier, j’ai quitté mon stage. Brutalement. Comme un geste de survie. Un départ en silence, presque furtif, sans un mot, sans explication. Juste un mail à ma directrice, envoyé après coup, annonçant mon absence. Pas de justification, pas de drame, juste ce besoin irrépressible de m’éloigner, de me préserver.


Depuis plusieurs jours, quelque chose grondait en moi. Une fatigue sourde, persistante. Une sensation d’étouffement, de pression interne que rien ne soulage. Le stress s’est infiltré sans que je m’en rende compte. Mon esprit s’est mis à ralentir, comme englué. Mon corps s’est mis à protester. Et le "Down" a fait son entrée.


Pour ceux qui vivent avec un trouble bipolaire, ce mot évoque bien plus qu’une simple baisse de moral. C’est une chute intérieure, parfois douce, souvent brutale. Un repli du monde vers l’intérieur. Une opacité dans les pensées, un ralentissement dans les gestes. Une lassitude immense. Et cette sensation que chaque chose devient trop. Trop à faire, trop à dire, trop à porter.


Pourtant, tout était prévu. Ma formation, mon stage, les projets à rendre, les échéances à respecter. Mon agenda était rempli, structuré, comme pour me rassurer, me guider. Mais là, je n’y arrive plus. Pas aujourd’hui.


Ce n’est pas une question de volonté. Ce n’est pas de la fainéantise, ni une excuse pour baisser les bras. C’est mon corps, mon esprit, qui m’envoient un signal clair : "Stop". Un mot simple, radical. Une alerte intérieure, que j’ai appris à reconnaître avec le temps. Et que j’ai décidé, aujourd’hui, d’écouter.


Il m’a fallu des années pour apprendre cela. Apprendre à m’écouter. À poser des limites. À accepter que je ne peux pas toujours faire semblant. Pendant longtemps, j’ai porté ce masque du "ça va". Ce sourire de façade, cette apparence de stabilité. Parce que dans notre société, montrer ses fragilités, c’est souvent perçu comme une faiblesse. Parce que parler de santé mentale reste encore un tabou.


Alors oui, j’ai appris à composer. À jongler entre le visible et l’invisible. À sourire quand ça ne va pas. À avancer quand l’envie manque. À construire une vie malgré tout : une vie riche, faite de projets, de rencontres, de réussites. Mais aussi, parfois, de silences lourds, de journées sans énergie, de retours en arrière.


Cette semaine, j’ai décidé de m’accorder une pause. Une vraie. Pas une fuite. Pas une capitulation. Une respiration. Une parenthèse pour me retrouver. Pour souffler. Dormir. Écrire. Penser. Ou juste être.


Je sais que certains ne comprendront pas. Que l’absence de signes visibles rend la chose difficile à saisir. Qu’il est déroutant de voir quelqu’un souriant, fonctionnel, et d’apprendre qu’il va mal. Moi-même, j’ai longtemps eu du mal à le comprendre. Mais aujourd’hui, je reconnais cette complexité. Cette ambivalence. Ce paradoxe de la souffrance invisible.


Il n’y a pas de honte à ralentir. Il n’y a pas de honte à dire : "Je n’en peux plus". Il n’y a pas de honte à prendre soin de soi, même quand tout pousse à tenir.


Le trouble bipolaire ne définit pas qui je suis, mais il façonne ma manière d’être au monde. Il m’impose une vigilance, une écoute permanente. Il m’enseigne aussi la compassion, pour moi-même et pour les autres. Parce que je sais ce que c’est, ce combat intérieur que personne ne voit. Parce que je sais l’énergie qu’il faut, parfois, juste pour se lever.


Je ne cherche pas la pitié, ni la validation. Je partage ce vécu parce qu’il me semble important de le dire. Parce que, peut-être, quelqu’un qui lira ces lignes se sentira un peu moins seul. Parce que, peut-être, cela aidera à comprendre que derrière chaque visage peut se cacher une histoire plus complexe qu’on ne l’imagine.


Cette semaine, je reste chez moi. Je recharge. Je réapprends à m’écouter. Je me rappelle que la performance ne vaut rien sans santé. Que l’élan revient mieux quand on a su s’arrêter. Que le repos est une force, pas une faiblesse.


Et si ce texte peut servir à une seule personne, pour se dire : "Moi aussi, j’ai le droit de ralentir", alors je n’aurai pas perdu ma journée.


Prenez soin de vous. Prenez soin des autres. Et n’oubliez jamais : il n’y a pas de vie parfaite, il n’y a que des vies réelles.


Ce lundi, comme tous les autres jours, j’aurai aussi plaisir à vous lire.


Christophe PIEDNOIR

Accompagner les Personnes dans leur Insertion Sociale et Professionnelle ▶️ Conseiller en Insertion Professionnelle en Devenir ▶️ Expertise en santé ▶️ Bienveillance, Proactivité et Impact


 
 
 

Comments


Christophe PIEDNOIR

311 avenue du 8 mai 1945

83470 Saint Maximin la Sainte baume

RebondPro.com

Accompagner l'Insertion Sociale et Professionnelle avec Expertise, Bienveillance et Impact. ▶️ Intérêt pour la Santé, le Handicap et la Réhabilitation ▶️ Construisons ensemble !

bottom of page